Beaucoup de recherche s’effectue présentement à l’extérieur des provinces de l’Atlantique afin de mieux comprendre la propagation des épidémies de tordeuses des bourgeons de l’épinette. Voici un excellent exemple de ce genre de travail, tel que décrit par mon collègue et responsable du projet, le Dr Yan Boulanger du Centre de Foresterie des Laurentides à Québec. – Rob Johns

Au cours de la nuit du 15 juillet 2013, un nombre ahurissant de papillons de la tordeuse des bourgeons de l’épinette a été observé à Rimouski, Québec. Ces papillons étaient si nombreux que les gens devaient littéralement « pelleter » les papillons afin de nettoyer leur allée et leur balcon. Suite à cet événement, les scientifiques se sont posé les questions suivantes : D’où ces papillons proviennent-ils? Sont-elles des populations locales? Viennent-ils d’ailleurs et si oui, de quelle distance? Toutes ces questions concernent les capacités de dispersion de la  tordeuse. On pense que la dispersion des papillons peut représenter un processus important afin de synchroniser les populations sur de très grande distance de même qu’à favoriser la propagation des foyers épidémiques. Cependant, comment pouvons-nous quantifier cette dispersion? Évidemment, il est virtuellement impossible dans ces conditions de suivre des individus en utilisant, par exemple, des « tags ». Quelques méthodes indirectes existent (par exemple, le ratio œufs/adultes, la génétique des populations, les modèles phénologiques, etc.) mais toutes ces méthodes permettent difficilement de savoir d’où les papillons proviennent exactement. Quelques fois, les scientifiques ont plus d’un tour dans leur sac afin de répondre à leurs questions. Et en voici un. Si ces bestioles étaient si abondantes dans le ciel de cette nuit, pouvons-nous les « voir » sur un … radar? Une image vaut mille mots. Regardez la vidéo ici. Ce que vous y voyez sont en fait les échos du radar météorologique de Val d’Irène, près d’Amqui, Québec, de la nuit du 15 juillet 2013. Ce type de radar est utilisé pour suivre le déplacement des précipitations (neige/pluie). Au moment où les échos ont été pris, la majorité du ciel était sans nuage. Pourtant, le radar montre une grosse « averse » traversant le fleuve cette soirée-là. Ce nuage est en fait des millions, ou devrais-je plutôt dire, des milliards de papillons qui dérivent au-dessus du fleuve Saint-Laurent depuis la Côte Nord jusque vers le Bas-Saint-Laurent.  Quelques-uns de ces échos laissent présager que des individus ont dérivé jusque dans le nord du Nouveau-Brunswick! Impressionnant non?

En collaboration avec des spécialistes des radars de l’Observatoire J.S. Marshall de l’Université McGill, des chercheurs de RNCan utiliseront les radars météo afin de caractériser la migration des papillons de la tordeuse des bourgeons de l’épinette. Cette étude aidera à développer un outil afin de mieux suivre le déplacement des papillons et de mieux comprendre la dynamique de dispersion de cette espèces durant une épidémie. Cet outil sera complémentaire à ceux développés à l’intérieur des projets utilisant les pièges à phéromones et les pièges lumineux de même que dans le cadre du projet de science citoyenne.

Responsable du projet : Yan Boulanger, Centre de foresterie des Laurentides.